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lundi 31 mai 2010

La Pampa

Le week end dernier nous sommes allés à la Pampa. En amoureux.

Nous sommes partis trois jours, deux dans un bled à mille milles de tous lieux habités (vous avez dû le remarquer, il y en a un certain nombre en Argentine) du doux nom de Puelches, puis le dernier à Santa Rosa, la capitale de la province.






Avant toute chose il est indispensable de se faire une idée de ce qu'est la Pampa argentine (la province en vert, ci-dessus), ou plutôt les pampas argentines.
La première est une mer d'herbe qui occupe près de 20 % du territoire argentin. De vastes champs de luzerne, de blé, maïs ou tournesol, de vastes prairies où paissent des milliers de têtes de bétail. C'est à elle que l'Argentine doit son surnom de "grenier de la planète".
la seconde est caractérisée par un sol pauvre en matière organique, salinisé et dont la faible humidité a engendré un semi-désert steppique de climat très continental. Ce fut une des zones appelées par les Mapuches (indiens du coin) « Huecuvu Mapu » ce qui se traduit approximativement par « Terre du Diable ».


Un Calden, arbre emblématique de la Pampa


Comme vous pouvez le déduire de notre réputation de joyeux lurons, c'est cette dernière que nous avons élu pour lieu de villégiature.
Il faut imaginer Puelches comme un village de 500 âmes parachuté au milieu de cette immense plaine de cactus et de touffe d'herbe. Il n'y a rien. Lorsque l'on demande aux habitants de quoi vivent-ils, ils sont bien en peine de nous répondre. Pour tout dire, ce village m'a fait penser à Bagdad Café.


La Chapelle du coin


Siga la vaca (Suis la vache), la cantine de Puelches pour les routiers de passage


Quelle drôle d'idée d'aller s'enterrer là deux jours entiers, allez-vous nous dire. Seulement voilà, à quelques 35 km de là se trouve le parc national Lihué Calel. Cette sierra qui culmine à quelques 500 mètres d'altitude est le lieu de rencontre de toutes les formes de vie de la région. On y trouve en effet de quoi se cacher ou s'abriter, un peu d'eau, du coup du gibier et des plantes...une véritable oasis dans la steppe.



Si on regarde bien, on peut voir des peintures rupestres, vestiges préhistoriques des premiers hommes à trouver refuge dans ces sierras







Il est important de savoir que dans la pampa seca, il ne pleut pas des masses. Par exemple dans ce village, ils n'avaient pas vu la pluie depuis 2 ans, une sécheresse terrible qui a décimé bien des troupeaux. Et ben nous on est arrivé le samedi à l'aube (4h du mat quand même), ca a vachement senti la pluie durant toute la journée. Pis le soir, la nuit, et toute la journée du dimanche c'est tombé, un vrai petit crachin breton ! Tous les villageois étaient agenouillés devant cette bénédiction, sur leurs joues la pluie se mélangeait aux larmes de reconnaissance pour ce miracle.
Au milieu de tous ces gens en état de grâce, Anne avancait, impassible : "Tu vois, je te l'avais dit...". C'est vrai qu'avant d'arriver je l'avais un peu mise au défi : "Bon ben on part dans un désert, on va pouvoir tester ta légende familiale" (ton ironique). (Cette légende dit que les Lamirand font pleuvoir, avec une probabilité d'autant plus forte que l'hydrométrie est faible. Antécédents remarquables : désert du Tamaklan (Chine), Sardaigne au mois de juillet (2 fois))
La prochaine fois je ferme ma gueule.
Enfin, cet évènement ne nous a tout de même pas empêché de bien nous balader. Ce qui m'a frappé dans ce paysage un peu lunaire, un peu désolé, c'est la diversité incroyable de couleurs, de senteurs, de textures qui, de loin ou a travers une photo ne transparaissent pas du tout. Très étonnant.

un Guanaco, sorte de lama sans poil au cri très étrange (au début je l'ai pris pour un oiseau), très présent dans ces paysages






Le soir nous sommes allés manger (et nous faire sécher) devant la cheminée d'un petit resto du bled où le serveur (un jeune homme avec une noblesse, une prestance typique des gauchos de la région qui ont beaucoup impressionné Anne) nous a fait gouter tout ce qu'on n'avait jamais manger dans une vache : la langue, la cervelle, les tripes et les tendons ! Le tout marniné dans une sauce type vinaigrette absoluement délicieuse. Depuis on est fan de langue, la cervelle si on se concentre très fort pour ne pas penser à ce qu'on mange c'est bon aussi, les tendons et les tripes on a plus de mal...

Pour finir voici quelque vers qu'un poète de Puelches du nom de Juan Carlos Bustriazo Ortiz a écrit dans les années 1950. Je les ai lu dans la cabane des guardaparques pendant qu'il pleuvait...

"(...) en un paisaje de adobes y de piedras solitarias (...) loco el viento de junio castiga, pardo y fuerte (...) encedida greda, blanda como un lecho, ramitas resecas, hueso vegetal. La tierra era pobre como el lugareño (...)"

traduction faite maison :
"(...) dans un paysage d'adobes et de pierres solitaires (...) fou le vent de juin malmène, brun et fort (...) flamboyante poussière d'argile, moelleuse comme un lit, brindilles désséchées, os végétal. La terre était aussi pauvre que son occupant.

vendredi 21 mai 2010

¡ Miam !

Chose promise, chose due.

Vous nous avez toujours connu gourmands gourmets. Aujourd'hui nous voilà devenus également cuisiniers en chef. Nous vous proposons quelques recettes que nous avons testé pour vous pour le plus grand plaisir de nos papilles. Bien sûr, il a fallu choisir entre toutes. Ne nous en veuillez pas trop de cacher la recette de la tarte au citron meringuée, de la daube ou du sauté de veau au chorizo (D'ailleurs, il suffit de faire un tour sur notre ami marmiton).
Bon, évidemment, quand on est devant d'aussi beaux plats durement préparés, on ne songe pas forcément à la photo. Vous devrez donc vous contenter de photos du net...

Pastel de papas ou hachis parmentier (bien) amélioré

Ingrédients

De quoi faire une purée : 4-5 patates, 1 noix de beurre, du lait et 1 oeuf.
De quoi faire une bonne garniture : 400 g de viande hachée, une boîte de tomate entières pelées, 1 oignon, de l'ail, 1 poivron, sel, poivre, aji (piment amer plus ou moins doux) moulu, oregan

Préparation

Je ne m'étend pas sur la purée : faire cuire les pommes de terres, les peler, les écraser en rajoutant du beurre et du lait jusqu'à une belle consistance. A cela, rajouter un oeuf entier cru qui finira de lier le tout.

Pour la garniture, le poivron, l'ail et l'oignon ouvrent la danse avec un peu d'huile jusqu'à ce que l'oignon soit légèrement transparent. La viande hachée vient alors faire ses premiers pas, suivi de peu de l'ensemble des condiments. Les tomates, coupées en morceaux, rejoignent la piste en dernier. Le bal se termine lorsque l'eau s'est dans l'ensemble évaporée.

Vont alors se superposer des couches de purée, de garniture et de fromage, de manière à ce que l'avant dernière couche soit de la purée et la dernière (vous l'aurez deviné) du fromage. Laissez au four le temps que les saveurs se mélangent et que le fromage gratine.



Risotto aux asperges

Ingrédients

1 botte d'asperges pour 4 environ
1 oignon
1 cube de bouillon
riz
parmesan

Préparation

Préparer les asperges (laver, couper les bases...). Réserver les têtes. Cuire les corps un quart d'heure dans une grande casserole d'eau bouillante salée. Pour les achever, les couper en morceaux. Ajouter un cube de bouillon à l'eau qui a servi à la cuisson des asperges.

Emincer un oignon. Le faire revenir sans brunir. Ajouter le riz et les asperges pour cuire le tout en risotto avec le bouillon. A la fin, lorsque le riz est encore chaud, y ajouter du parmesan rapé.

A part, pour finir, faire revenir les têtes d'asperges dans un peu de beurre. Les disposer en décoration gourmande sur le plat de risotto.


Empenadas tout ronds à la viande

Ingrédients

Pour la pâte (en théorie pour une vingtaine d'empanadas)
600g de farine, 150g de beurre, 3 oeufs, eau tiède, sel

Pour la farce
500g de viande hachée, 4 oeufs durs, 2 patates cuites à l'eau, une tasse d'olives découpés en petits dés, une petite boîte de petits pois, une petite boîte de maïs, deux oignons, une gousse d'ail , sel, poivre, épices si on le désire.

Préparation

Faire un puits au centre de la farine, y faire plonger le beurre et les oeufs. Ramener peu à peu au centre jusqu'à que le puits soit bouché par une pâte homogène. Inonder si nécessaire. Se reposer une trentaine de minute en abandonnant le fruit de ses soucis au frigo. Le récupérer seulement pour le couper en soixante petits morceaux (que je pourrais facilement emprisonner dans ma petite main). En écraser férocement deux par empanada : un pour dessus, un pour dessous.

L'ordre de persécution des éléments de la farce m'échappe puisque je n'ai pu participer à ce jeu-là. Soyez imaginatif dans la cruauté !
Il est certain cependant qu'il finissent tous ensemble entre deux boules de pates étalées que l'on ressert autour d'eux. Les piques d'une fourchette obstruent définivement tout espace possible de sortie.
Pour finir les enfourner chaudement (200-240°) durant 15 minutes environ.
oui, je sais, ceux-ci ne sont pas ronds...

Pré-pizzas

Ingrédients (pour 4 pizzas)

1 kg de farine
1 sachet de levure
1 cuillère à soupe de sel
eau tiède
1 pot de sauce tomate
oregan
huile

Préparation

L'astuce d'une bonne pizza est simplement dans cette pré-pizza. La pâte se fait avec de la levure dans un puit au centre de la farine qui médite un peu en compagnie d'un peu d'eau pour commencer, puis est rejointe par le sel et l'ensemble de la farine. Elle se cuit encore collante aux mains et un peu élastique au maniement. L'huile la protège du plat sur lequel elle est étirée. On la recouvre alors de sauce tomate puis d'oregan ou épices de notre choix. La pré-pizza se précuit à four chaud pendant quelques minutes (5-10 environ).


dimanche 16 mai 2010

Les Portes

Je n'ai pas le talent d'Antoine (surtout lorsqu'il se conjugue à celui de Camus), mais je veux bien vous montrer quelques unes des portes que l'on nous a ouvertes durant nos après-midi et soirées.

Ceux qui nous connaissent, nous reconnaîtrons immédiatement; la première porte qui s'est imposée à nous ouvre tout droit aux bras de Morphée. La sieste fut décrétée obligatoire pour le bien de tous. Provisoire au départ, elle fut déclarée permanente au vu de l'énergie incroyable nécessaire pour à peine satisfaire les enfants, de nos longues soirées bavardes avec les deux espagnoles, et... de notre amour pour cette activité. Elle rythme à présent nos journées.

Une fois nos sacs bien rangés et notre fatigue amoindrie, nous sommes partis jouer à un jeu extraordinaire -surtout pour moi-, celui de " je parle trop bien une langue étrangère ". Normal, direz-vous, on est les étrangers. Nous avons fait alors connaissance de l'Alliance francaise de Bahia Blanca. La Fondation Alliance française est une fondation française de droit privé reconnue d’utilité publique et dont la mission est la promotion de la langue et de la culture française à l’étranger. Concrètement, elle donne des cours de francais et propage la culture francaise dans le monde. C'est un puissant outil de diplomatie et dépend donc énormément de l'ambassade.

Pour nous, elle a surtout rimée avec rencontre. D'abord celle d'un jeune lycéen qui nous a fait visité son lycée de fond en comble, nous faisant entrer dans toutes les classes où il y avait cours pour montrer "les francais". Ensuite, celle d'une professeur de francais géniale qui nous a emmené à quelques uns de ses cours avec des 3èmes. Comme j'aurais aimé une prof comme celle-ci ! J'ai découvert, en plus du fait qu'un cours de langue peut être instructif et amusant, le seigneur Partitif. Et enfin, celle, très agréable, de jeunes de nos âges désireux de nous intégrer parmi eux, de nous faire découvrir leur Patrie (et oui, ici, la fierté nationale, titillée au cours des siècles par la présence impérialiste anglaise ou états-unienne, n'est pas qu'un slogan fasciste) et de nous faire conter nos vies !

Ainsi, nous fûmes invités à notre premier asado, grillade nationale aux dimensions... nationales. Je vous laisse consulter les photos pour mieux saisir mon propos.






On profita même de l'occasion pour fêter l'anniversaire d'Antoine avec un beau gâteau aux deux bandeaux.

Depuis cette première et belle soirée, nous les avons revu à un concert de soutien en faveur du Chili (dont un des chanteurs culminait dans l'art du kitsch), pris le maté ensemble et nous projetons à présent de partir pour un week end à Sierra de la Ventana, belle montagne relativement proche de Bahia.

Une autre porte nous fut ouverte de facon "Espectacular !". A la recherche d'une activité pour nos après-midi (après la sieste), nous poussâmes celles de la municipalité. Guidés vers le bureau des projets sociaux, nous fîmes la rencontre d'une joyeuse équipe de jeunes et de leur chef de nature (sur-)enthousiasmée. Ils promeuvent l'implication des jeunes dans la vie sociale en coordonnant différentes commissions (santé, environnement, culture... ) auxquels peuvent se rattacher les lycéens qui désirent monter une proposition de projet. A la fin de l'année, tous les groupes se réunissent et élisent le projet de leur choix. Celui-ci recevra 5000 pesos pour se concrétiser l'année suivante.

Le projet correspondant le plus à notre profil s'est révélé être... des cours de francais ! Nous les dispensons avec sérieux tous les mardis dans une bibliothèque très près de chez nous devant un énorme public (6 personnes) fort enthousiasmé (ca, par contre, c'est vrai). Bien évidemment, dans l'intention de donner ce qui m'a toujours manqué, nos cours sont remplis de jeux plus ou moins réussis. Que c'est étrange de redécouvrir ainsi sa langue maternelle !

Comme tout argentin qui se respecte, l'équipe nous a invité à une de ses réunions : un soir, autour de panchos (hot dog) et de cocktails. Malheureusement, depuis, ils veulent qu'Antoine vienne jouer au foot ou à la playstation. Comment refuser délicatement ? Nous, on préfère les panchos et les cocktails...


Pour ne rien révéler du prochain message et ne pas vous faire saliver, je ne vous dirai pas qu'Antoine et moi ouvrons également la porte de notre cuisine assez souvent pour nous transformer en petits marmitons...

Plein de bisous

lundi 3 mai 2010

La Peste

A première vue, Bahia Blanca est une ville ordinaire et rien de plus qu’une cité portuaire de la côte Atlantique. Située à 750 km au sud de Buenos Aires, elle marque la frontière nord de la Patagonie argentine. Son appartenance à la même province administrative que la capitale rappelle la dilatation des distances inhérente à un pays grand comme cinq fois la France. Elle compte 300 000 âmes.
D’aspect tranquille, il faut quelque temps pour apercevoir ce qui la rend différente de tant d’autres villes commercantes, sous toutes les latitudes. Comment imaginer, par exemple, une ville où les chiens errants remplacent les pigeons, où le tri des ordures est assuré la nuit par des boueux sur leur charrue à cheval ?
Pendant l’été, le soleil incendie les maisons trop sèches et couvre les murs d’une cendre grise; les thermomètres dépassant les 45 degrés. La transition avec l’hiver se fait brutalement, au moyen de spectaculaires tempêtes qui permettent en quelques semaines à la nuit de jeter une chape de froid que le soleil à chaque jour plus de mal à dissiper.
Une manière commode de faire connaissance avec une ville est de chercher comment on y travaille, comment on y aime et comment on y meurt. Sans doute, rien n’est plus naturel, aujourd’hui, que de voir des gens travailler du matin au soir et choisir ensuite de perdre aux cartes, au café, et en bavardage, le temps qu’il leur reste pour vivre. Mais il est des villes et des pays où les gens ont de temps en temps, le soupcon d’autre chose. Celui de pouvoir s’échapper de sa ville, de changer, le temps d’une fin de semaine, d’atmosphère. En général cela ne change pas leur vie. Seulement il y a eu le soupcon et c’est toujours cela de gagné. A Bahia Blanca, les distances étirées à l’infini interdisent toute évasion. La ville s’est greffée au milieu d’un plateau nu, entouré de collines lumineuses, devant une baie au dessin parfait. On peut simplement regretter qu’elle se soit construite en tournant le dos à cette baie et que, partant, il soit impossible d’apercevoir l’océan qu’il faut toujours aller chercher. Loin, puisque les usines du port ayant contaminé le bord de mer, la plage la plus proche de la ville est Pehuen Co, à 85 km.
Aussi lorsqu’un morceau d’étranger aussi exotique qu’un francais vient se perdre dans cette ville, on comprendra qu’il sucite pour le moins l’attention.
Ceci lui permet d’ouvrir des portes qui, dans une région moins autarcique, lui seraient restées fermées.